Le prix Mo Ibrahim 2017, remet de nouveau au devant de la scène une femme d’exception: ELLEN JOHNSON SIRLEAF.
L’investiture du successeur à la magistrature suprême libérienne, le 22 Janvier dernier a officialisé l’ouverture d’une nouvelle page de l’histoire de cet Etat d’Afrique de l’Ouest. Cependant, l’ex-locataire à la présidence du Libéria ne cesse de faire parler d’elle à travers ses œuvres, rester à jamais graver dans la mémoire collective, non pas seulement d’un peuple, mais d’un continent. La décision du Comité scientifique sur le choix du récipiendaire du prix Mo Ibrahim 2017, consacra cet état de fait. Le 12 Février dernier, le profil ayant retenu l’attention dudit comité a été connu : il s’agit de celui d’une femme aux origines métissées, d’âge mûr, la quatre-vingtaine presque, vêtue à l’Africaine, une étoffe de tissu à l’épaule, turban à la tête, sous lequel se dissimule sagement la chevelure. Description banale qui dévoile une personne d’exception : Ellen Johnson Sirleaf.
Ellen Johnson voit le jour le 29 Octobre 1938, à Monrovia, capitale libérienne, au sein d’une famille plutôt aisée. Dont le père, Jahmele Carney Johnson exerce la profession d’avocat. La petite fille reste dans le cocon familial durant toute son enfance et une partie de son adolescence.
La jeune femme précoce et tourmentée…
Dès l’âge de 17 ans, la fille de Monrovia est arrachée d’une adolescence à peine amorcée. En effet, elle devient Madame Sirleaf, suite à son union avec James Sirleaf ; un homme plus âgé et alcoolique. Au même moment, Ellen débute sa carrière professionnelle et travaille au Ministère des Finances. Cependant, elle est une femme peu épanouie dont les violences conjugales rythment le quotidien. Sa maternité reste sa seule motivation pour endurer cette vie conjugale. A 23 ans, Madame Sirleaf prend la difficile décision de divorcer, on est en 1961. Divorce à la suite duquel elle ne perd pas le patronyme ‘’Sirleaf’’.
Afin de pouvoir se réaliser sur le plan professionnel, la future première dame libérienne reprend ses études et obtient tour à tour un baccalauréat en comptabilité, un diplôme d’Economie et un Master en Administration Publique de l’Université d’Harvard, une des plus prestigieuses des Etats-Unis ; ceci en 1971. Ce qui lui vaudra une ascension de carrière fulgurante.
« La dame de fer » africaine…
Ellen Johnson Sirleaf prend le surnom de « dame de fer ». D’abord à cause de ses convictions qui vont à l’encontre du régime en place, mais qu’elle n’hésite pas affirmer, mais également parce qu’elle est une sorte de seule « rescapée » d’un régime dont les membres ont été pour la plupart assassinés après la venue de Samuel Do au pouvoir en 1980. La chute du régime de Richard Tolbert, au sein duquel Ellen occupait la fonction de Ministre des finances la contraint à l’exil dont le retour sera programmé quelques années plus tard. De nouveau au Libéria, sous la gouvernance de Samuel Do l’ancienne Ministre persiste à affirmer ses convictions qui fâchent un peu le régime en place : c’est ainsi qu’elle sera condamnée à 10 ans de prison.
Les réalisations
Par son accession à la magistrature suprême lors du scrutin libérien de 2005, Ellen brise les tabous socio culturels africains qui relayent la gente féminine au second plan. Elle marque le début de l’ère de la féminisation de la fonction présidentielle en Afrique. Au terme des deux mandats qui l’ont mené jusqu’en 2017, la première femme chef des forces armées africaine choisit la voie de l’alternance en renonçant à se présenter de nouveau ; un exemple fort dans un environnement politique africain où l’éternisation au pouvoir est le principe.
Ses distinctions en tant que co-récipiendaire du prix Nobel de la Paix en 2011, et plus récemment celui du prix Mo Ibrahim 2017 pour le leadership la hisse au sommet de l’image d’ ‘’ambassadrice de paix’’.
Népotisme, corruption et exécution partielle des promesses électorales en ce qui concerne la condition des femmes sont quelques griefs portés à la gouvernance de cette « dame de fer ». Ce qui n’enlève rien à la singularité d’une page de l’histoire libérienne qui s’est tournée, mais reste inscrite dans un livre d’or.
Antoine Tankeu