Le blog AFFY est allé à la rencontre de Mlle Sylvia EBELLE, la Vice-Présidente de l’association Lead Ship basée dans la ville de Garoua au Cameroun. Cette association organise du 02 au 04 décembre 2021, sa 2ème édition du Séminaire de la Jeune Fille en état de vulnérabilité.
Bonjour Mlle Sylvia EBELLE
Merci d’avoir accepté cette interview du blog AFFY.
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Pouvez-vous vous présenter brièvement à notre jeune audience ainsi que votre parcours académique, professionnel et associatif ?
Bonjour je me nomme Ebelle Sylvia Julianna. Je suis âgée de 29 ans, je réside à Douala et je suis la vice-présidente de l’association Lead Ship.
Mon intégration à Lead Ship part tout d’abord d’un choix, celui de vivre une vie qui compte. En effet lorsque je décide de continuer mes études secondaires en série B (sciences économiques et sociales) après avoir obtenu mon BEPC en 2008, je me sens comme captivée par l’économie en général et comment répondre aux besoins des populations vulnérables en particulier. C’est ainsi qu’une fois à l’université en 2011 je m’inscris en économie et gestion pour me spécialiser plus tard en licence et en Master en économie et finance internationale.
Ma vie associative débute en 2016 avec l’association SOURCE DE VIE qui œuvre dans le social en venant en aide aux personnes vulnérables au travers des campagnes de santé gratuites, des dons aux orphelins et veuves. En parallèle, j’intègre Lead Ship avant sa création officielle le 05 février 2019 comme conseillère, puis depuis mars 2020, je suis élue au poste de Vice-présidente.
Sur le plan professionnel, j’ai effectué un stage professionnel au siège national du PNDP (programme de développement participatif) à Yaoundé, puis je suis retenue par Ecobank Cameroun en décembre 2019 pour un CDD qui malheureusement n’aboutit pas à cause de la pandémie Covid. J’ai ensuite eu un CDD avec le Cabinet Deloitte & Touch pour un contrat à durée déterminée (CDD). Femme très entreprenante à la base, j’ai à mon actif une boutique de vêtements et une entreprise de production et de livraison de jus naturels à base de fruits.
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A présent, parlez-nous de l’association Lead Ship. Quelles étaient les objectifs visés en créant cette association ?
L’objectif majeur de Lead Ship est d’encourager la capacitation des leaders par le bas. Nous voulons former des leaders jeunes et équilibrés car c’est la jeunesse qui fait la force d’une nation et si elle est encadrée tôt elle aura un très grand impact présentement, mais également dans le futur.
Nous sommes une organisation de jeunes dont la vision est d’impulser le développement par le bas au travers de la capacitation du leadership de la jeunesse. Nous travaillons à Booster le leadership et impulser le développement local par les jeunes au Cameroun. Nous nous voulons réponse au besoin de développement local au Cameroun et vecteur de la promotion du potentiel individuel et collectif pour un pays transformé au travers de nos différentes offres de formations en leadership. Notre but ultime étant le développement personnel et local, plus précisément l’expression totale du potentiel des jeunes pour l’épanouissement et le développement de leurs communautés respectives.
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Comment évaluez-vous vos actions à ce jour ?
Bien qu’ayant 2 ans d’existence, nous avons à notre actif plus de 25 formations organisées dans 6 villes différentes, une grande campagne de don de sang à l’hôpital régional de Garoua et deux salles de classes construites grâce au généreux soutien de l’ONG World Connect. Nos compétences sont diverses et variées et couvrent un ensemble de thématiques, ce qui nous permet de toucher notre cible de manière efficace et holistique.
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Du 02 au 04 décembre prochain, vous organisez la 2ème édition du Séminaire de la jeune fille vulnérable. Quels résultats attendez-vous de cette édition ?
Notre préoccupation majeure est d’abord la santé mentale des participantes, c’est ainsi que nous espérons contribuer à leur épanouissement moral en leurs donnant un safe space où elles pourront s’exprimer librement. Mais aussi faciliter leurs épanouissement financier au travers des ateliers pratiques dispensés et de créer un réseau d’entre-aide des jeunes filles en état de vulnérabilité qui se soutiendront partageront leur expérience et encourageront d’autres jeunes en proie aux mêmes difficultés.
Ceci dit, Notre résultat ultime au travers de ce séminaire est que nos participantes, des personnes en état de vulnérabilité, reconsidèrent la conception qu’elles ont d’elles-mêmes parce qu’ayant leurs capacités entrepreneuriales et techniques renforcées. Etant donné que l’autonomisation est efficace pour briser les normes de genre négativistes, il s’agira spécifiquement lors de ce séminaire:
– de faire prendre conscience aux participantes de qui elles sont réellement et de la valeur qu’elles ont en tant que femme ;
– d’aider les participantes à s’épanouir socialement et financièrement et ;
– de faciliter leur insertion dans la société.
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A l’occasion de ce projet, vous avez lancé un appel à contributions en ligne pour récolter la somme de 890 000 XAF (1 357 €) pour assister 50 jeunes filles en situation de vulnérabilité. Comment précisément seront utilisés les fonds récoltés ?
Les fonds recueillis seront utilisés non seulement pour la formation des jeunes filles pendant 3 jours, mais aussi leur accompagnement financier en partie ou en totalité en fonction des besoins estimés. Puis un suivi de qualité avec des formations trimestrielles ultérieures avec d’autres partenaires techniques tels FEDAGRO, l’association des femmes porteuses d’espoir, Sahel Business Academy, Jayngol Nderkaku, Garizim Foundation, LYD Innov’ etc. seront envisagés.
Nous envisageons par ailleurs soumettre un dossier pour lever des fonds qui vont aider à mettre sur pied un système de financement (seed funding) des idées business de nos participantes.
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Quelles sont les perspectives de l’association Lead Ship ?
Lead Ship à beaucoup évolué à ce jour. Parti d’une simple vision, l’enfant (comme nous aimons appeler notre association) grandit et se fraye chaque jour un chemin de plus en plus large vers des nouveaux horizons avec des partenaires de choix et de qualité. En plus de notre Séminaire, nous avons d’autres programmes en gestation ou en réflexion tels que le SaHelpNitary Pads Bank (projet d’éducation à l’hygiène intime en zone rurale), Leader Seed program (projet d’initiation au leadership au secondaire via activités post et péri scolaire) et la Lead-Her-Ship BootCamp qui va consister à travailler à allumer la flamme du leadership chez des filles qui seront alors agents de changement pour le continent.
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Parlant du jeune leader que vous êtes, qu’est-ce vous a poussé à vous lancer dans l’entrepreneuriat social ? Quelle est votre ressenti en tant que femme en position de leadership ?
J’ai toujours voulu encourager et booster le moral des jeunes en général (pas seulement les filles mais les jeunes en général), de sorte qu’ils sortent de leurs coquilles. Nous avons tous un potentiel énorme qu’on se doit d’affirmer. Pour cela, il faut que chacun découvre son potentiel et ensuite puisse l’utiliser pour la bonne marche de la société. Je souhaite que les jeunes de mon pays cessent d’être des victimes mais des personnes influentes pour leur génération mais aussi d’autres générations, tout ceci en vue du développement social et économique de nos communautés.
Lead Ship est une association qui respire le leadership féminin, avec une équitable considération des personnes quand il s’agit de prendre des décisions. Notre président qui est lui-même un modèle de leadership serviteur n’a de cesse de me pousser et de m’encourager afin que je puisse donner le meilleur de moi dans l’exercice de mes fonctions. Bien qu’originaire du Nord, c’est un He for She qui a une perspective différente du pouvoir et de l’importance de la femme.
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Comment appréciez-vous, l’exercice du leadership associatif au Cameroun et précisément dans les régions du Grand-Nord ? Quelles en sont les opportunités et les menaces/obstacles ?
La question du Leadership jeune est une question qui nous tiens particulièrement à cœur à Lead Ship, nous avons voulu faire différemment parce que nous sommes convaincu que la jeunesse elle aussi peut apporter un changement positif dans la vie du pays. Malheureusement, même si il y a des mouvement qui se déploient réellement dans ce sens, les associations jeunes sont pour la plupart peu considérées et plus souvent utilisées comme levier de mobilisation des masse populaire pour des occasions festives et/ou politique. Pourtant le champ est vaste et vierge et quasi inexploré, les défis propres aux régions septentrionales du pays sont légions et les opportunités d’impact nombreuses. Mais comme Bobeto (le président de Lead Ship, NDLR) a l’habitude de le dire, « les choses bougent et l’on se doit de continuer d’avancer ».
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Comment évaluez-vous l’implication des jeunes camerounais dans les activités de leadership ? Que proposez-vous pour améliorer leurs aptitudes en leadership.
Les jeunes sont de plus en plus impliqués dans la vie de leurs communautés et ont une vision plus large de leurs avenir et savent ce qu’ils veulent. Il y a, à mon sens, un certain mouvement qui me permet de dire que la jeunesse prend conscience et devient réellement le fer de lance de la Nation. Cependant, il faut que qu’il y ait un système de formation continue ou bien des programmes de renforcement des capacités techniques qui permettront de mieux opérationnaliser le déploiement sur le Terrain.
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Quels conseils donneriez-vous à un jeune africain et précisément aux femmes qui aspirent à avoir de l’impact dans leur société à travers une initiative sociale ?
De plus en plus de jeunes s’impliquent réellement dans des activités de leadership en faisant plus de formation de qualité et en organisant plus de rencontres d’échanges entre leaders car je pense à mon humble avis que beaucoup se lancent sans avoir réellement conscience de ce que cela implique.
Mon conseil avant de lancer toute initiative serait d’être sûr que l’on est appelé pour cela. Car pour moi, il faut avoir des prédispositions dès le sein maternel pour pouvoir initier, piloter et implémenter un projet social. De ce fait, il faudrait se rassurer que l’on soit fait pour, car c’est un parcours jonché de difficultés et accompagné d’incompréhension et même de larmes. Si tel n’est pas votre vocation, le risque de lâcher prise est grand. Néanmoins, il y’a un grand bonheur derrière tout cela. Je souhaiterais donc encourager les jeunes particulièrement les femmes à être fortes, à s’armer de patience de travailler avec beaucoup d’hardiesse et de joie car c’est une grande joie que d’œuvrer dans le social.